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Cinquième et dernière apparition de la Vierge

Le soir du 24 mars 1983, je me trouve à la "Salle des Bras" - au sous-sol de l'église Notre-Dame de Damas. J'assiste à la représentation donnée par la troupe du "Théâtre engagé". C'est sa dernière représentation et je leur ai promis d'y assister.

Pendant l'entracte - il est près de 21 heures 15 - je me trouve près d'un de mes grands amis, le metteur en scène Samir Salomon. Le docteur Élie Barsa vient me dire :

- Les Nazzour t'en veulent de ton absence.

Spontanément, je me lève, m'excuse et pars avec le docteur Barsa, dans sa petite voiture, à Soufanieh. Dans la voiture se trouve aussi l'avocat Georges Homsi.

Je sonne. Un long moment s'écoule avant que l'on n'ouvre. C'est Awad, le frère aîné de Nicolas. Il me souffle à l'oreille

- Père, ils sont sur la terrasse.

Je comprends. Je monte directement à la terrasse, tandis qu'Élie et Georges restent dans le patio, priant devant l'Image. Sur la terrasse, je trouve tous les gens présents à genoux, dans un silence étonnant. Il fait bien froid. Je m'agenouille à mon tour. J'essaie de distinguer les visages dans la pénombre. Peu à peu, je reconnais le P. Malouli, Myrna, Nicolas, Nabil Maarri, Salim Mohsen, sa mère Sophie, la mère de Nicolas, et quelques visages de leurs voisins, les Jarallah.

Tout à coup, j'entends Myrna dire d'une voix calme et posée :

«En cette nuit, l'ange m'a dit : Tu es bénie entre les femmes. »

Le message se poursuit avec le calme de qui accueille les mots et les répète fidèlement. Les mots sont étonnants de simplicité, de beauté, de tendresse et de dureté à la fois

«Je suis contente... Qu'ils sont beaux mes enfants à genoux, implorant... L'Église qu'a adoptée Jésus est une Église une, parce que Jésus est UN. »

Tout le message tourne autour de points essentiels, dont le plus important est l'Unité de l'Église, et la nécessité de la prière.

De nouveau le silence. Même Myrna se tait. Subitement, je l'entends dire : «Je crois en Dieu ... » Toutes les personnes présentes poursuivent le Credo jusqu'au bout. Puis Myrna dit : «Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté».

Alors, elle se signe d'un grand signe de croix et se lève. Nous nous levons à notre tour. On se regarde les uns les autres, comme si l'on revenait d'un autre monde... Élie Barsa se tient derrière moi.

Le P. Malouli demande à Myrna pourquoi elle a fait un signe de croix en l'air, après qu'elle eut oint, avec l'huile qui avait coulé de ses mains, les fronts des gens présents. Elle lui répond d'un ton calme et naturel :

- Père, je n'ai pas fait un signe de croix en l'air : je l'ai fait sur le front de la Vierge : c'est Elle qui me l'a demandé, et j'en ai fait autant pour tous. La Vierge se tenait ici même.

Et elle indique un point où je vois une grande tache noire, dont personne ne s'approche. Je sais aussitôt qu'il s'agit de la tache d'huile causée par l'huile qui a coulé des mains de Myrna.

Nabil Maarri lui demande : - Pourquoi m'as-tu frappé sur la main ?

Myrna lui répond :

- Parce que tu as failli toucher le pied de la Vierge, quand tu as tendu la main.

- Pourquoi, lui demande le P. Malouli, as-tu dit le Credo ? - C'est la Vierge qui a commencé par le dire ; j'ai continué.

Il lui demande aussi :

- Pourquoi as-tu dit : «Gloire à Dieu au plus haut des cieux» ? au lieu de «Gloire au Père, au Fils ... »?

- Je n'ai fait que ce qu'a fait la Vierge.

Puis le P. Malouli lui demande : - Qu'as-tu vu ?

Elle répond :

- La Vierge se tenait là - elle indique un endroit très proche de la tache d'huile - et Elle ouvrait ses mains. Un chapelet descendait d'entre les doigts de sa main droite. Quand la croix du chapelet me toucha la main, l'huila coula de la croix sur ma main.

Myrna se tait.

Nabil Maarri se tourne alors vers moi et me dit :

- Père, tu aurais dû voir la quantité d'huile qui a coulé de ses mains. Le sol en était couvert. Je tendis les mains et m'en mis sur le visage et la tête.

Nicolas apporte à ce moment une grande touffe de coton, imbibée d'huile, avec çà et là des traces de poussière.

Je demande à Myrna : - Comment était la Vierge ?

Elle sourit : - Tellement belle que je ne peux pas lui donner d'âge !

Au salon, je prends le P. Malouli à part et lui demande ce qui s'est passé. Il tient un magnétophone à la main. Il me dit :

«L'après-midi, je remarquai que Myrna était quelque peu inquiète. Elle cherchait à s'isoler et à lire l 'Évangile. Comme l'huile coulait depuis plusieurs jours sans interruption, et que demain nous fêtons l'Annonciation, je m'attendais à quelque chose. Je voulus donc préparer le magnétophone que j'avais acheté à la suite de l'apparition du 21 février, pour pouvoir enregistrer le moindre mot, si jamais une apparition se produisait. Je réclamai des piles qu'on m'apporta vers six heures. Je préparai l'appareil. Nous célébrâmes la prière comme d'habitude. Après la prière, le docteur Margi et sa famille restèrent un moment. Le docteur voulait entre autres comprendre pourquoi on prie pour les morts. Myrna était avec nous, mais il était évident qu'elle était complètement absente. Le docteur la crut fatiguée, il se retira avec sa famille Je l'accompagnai jusqu'à la porte extérieure. De retour dans le patio, je ne vis pas Myrna. A ma question, Awad me dit qu'elle venait de monter à la terrasse. Je pris donc le magnétophone et courus à la terrasse, avec les personnes présentes.»

A mon tour, je lui raconte comment Élie Barsa m'a parlé, et comment je me suis levé spontanément et suis venu à la maison sans hésitation.

Ce qu'a dit la Vierge sur l'Unité de l'Église ne me surprend pas, bien que cela soit franc, fort, voire dur.

Cela ne me surprend pas. Nombreux sont les gens qui, depuis le début du Phénomène, disent : «La Vierge veut peut-être l'Unité de l'église. »

Dans leur spontanéité, les gens misent sur une chose qui peut paraître étrange, mais c'est de ce point que part l'intuition populaire

Myrna est grecque-catholique...

Nicolas, son mari, est grec-orthodoxe...

Est-ce que la Vierge ne voudrait pas unifier l'église ?

A ce propos, je dois citer un fait que ne connaissent que quatre personnes : M. Adib Mousleh, le P. Adel Khoury, doyen de la Faculté de Théologie de Munster en Allemagne, mon ami Roger Kahil au Canada et moi-même :

En date du 9 février 1983, mon ami Adib Mousleh avait terminé un article sur Soufanieh, que lui avaient demandé certains de ses amis étrangers. Il avait écrit l'article en français. Il me l'a passé. Il comptait le publier. Je lui ai demandé une totale discrétion, quitte à cacher l'article un certain temps, plus ou moins long, de peur d'aller trop vite et donc de provoquer certains responsables ecclésiastiques, et d'ajouter ainsi, sans le vouloir, des obstacles devant le Phénomène. Or, Adib a terminé ainsi son article :

«Le 9 janvier 1983, à 9 h 30 du matin, l'Icône a été transportée dans une procession incomparable, au milieu de louanges à la Mère de Dieu, chantées alternativement par des chœurs orthodoxes et catholiques. Sur le court trajet séparant la maison de l'église, près de 70.000 personnes s'étaient rassemblées pour bénir, remercier et honorer la Sainte Vierge qui a voulu bénir leur ville. Quelques jours plus tard, à l'occasion de la semaine de l'Unité des Églises, et pour la première fois en Syrie, orthodoxes et catholiques, représentés au plus haut niveau, ont célébré des prières communes, imprégnées d'une atmosphère de fraternité sans pareille. Était-ce là l'un des messages de la Vierge de Soufanieh ? Souhaitons que son plus grand miracle soit la réunification de nos Églises.»

M. Mousleh a tenu compte de mon avis et n'a pas publié l'article. Il M'a donné même le texte, qui est signé du 9 février 1983.

Et voici que la Vierge, le soir du 24 mars 1983, confirme cette intuition, en des mots qui ne laissent place à aucun doute.

Cette nuit du 24 mars, je reviens donc à l'église directement. Je ne cesse - et ne cesserai depuis - de me poser la question de savoir pourquoi je me suis levé d'un coup, sur le mot du docteur Barsa, au lieu d'attendre jusqu'au lendemain par exemple, ou de laisser les choses aller leur train habituel, pour n'avoir pas à enfreindre ma promesse ? Et pourtant, il n'y avait pas dans ce qu'a dit Élie Barsa de quoi justifier la moindre urgence.

Le lendemain, je n'en dis pas un mot à Mgr François, mon supérieur, en conformité avec ce que nous avions décidé dès la première apparition : silence total, jusqu'à nouvel ordre, pour ne pas causer du tort à Soufanieh, en provoquant la risée des gens, et, en conséquence, la réticence, voire l'opposition de la Hiérarchie.

Le plus drôle est que l'on a gardé le secret à l'égard du P. Malouli lui-même, jusqu'au soir du 21 février 1983. Pendant tout ce temps, il n'a cessé de dire :

Un chaînon manque au Phénomène. Il doit y avoir des messages.

Quant au texte du message lui-même, le voici intégralement :

«Mes enfants, Ma mission est terminée. En cette nuit, l'ange m'a dit "Vous êtes bénie entre toutes les femmes". Et je n'ai pu lui dire que : "Voici la Servante du Seigneur". Je suis contente. Moi, je ne mérite pas de vous dire "Vos fautes sont remises." Mais mon Dieu l'a dit. Fondez une Église. Je n'ai pas dit : bâtissez une église. L'Église qu'a adoptée Jésus est une Église UNE, parce que Jésus est UN. L'Église est le royaume des cieux sur la terre. Qui l'a divisée a péché. Et qui s'est réjoui de sa division a péché. Jésus l'a bâtie : elle était toute petite. Et quand elle a grandi, elle s'est divisée. Qui l'a divisée n'a pas l'amour en lui. Rassemblez. Je vous dis : Priez, Priez, Priez ! Qu'ils sont beaux mes enfants à genoux, implorant ! N'ayez pas peur ; Je suis avec vous. Ne vous divisez pas comme le sont les grands. Vous, vous apprendrez aux générations le mot d'Unité, d'Amour et de Foi. Priez pour les habitants de la terre et du Ciel.»