Projet Nouveau Regard

Une huile venue du ciel

Le don de l'huile à Soufanieh

DU 24 au 26 juin 2003, Madame Myrna NAZZOUR, de SOUFANIEH (Damas, Syrie), accompagnée du Père Elias ZAHLAOUI, est venue à Wisques, à l’invitation du Père Abbé et du Projet Nouveau Regard, pour donner son témoignage à nos deux communautés monastiques – Saint-Paul et Notre-Dame – et à quelques invités parmi lesquels Anne Dambricourt Malassé, Pierre Perrier (UR-PNR), et Nicolette Delanne (PNR). Monseigneur Jean Paul JAEGER, Evêque d’Arras, Boulogne et Saint-Omer, empêché pour raison de santé, n’avait pu se joindre à nous. Patrick SBALCHIERO (Historien de la spiritualité, directeur de publication du Dictionnaire des Miracles et de l’extraordinaire chrétiens [Fayard 2002], et membre de l’Unité de Recherche du PNR) avait organisé le voyage en Bretagne, à Wisques, et en Belgique.

I. MYRNA DE SOUFANIEH

« Ô Sainte Vierge Marie, je t’en supplie : Ne nous prive pas de ton huile ! Je vous ai donné de l’huile plus que vous n’en avez demandé, et je vous donnerai quelque chose de bien plus fort que l’huile ».

Myrna al-Akhras, de son nom de jeune fille – Myrna est un diminutif de Marie – est une jeune femme Syrienne, née en 1964, catholique de Rite Melkite, mariée en mai 1982 à Nicolas Nazzour, grec-orthodoxe. Ils ont deux enfants, Myriam (17 ans) et Jean Emmanuel (15 ans), nés après le commencement des événements.

L’huile mystérieuse est apparue pour la première fois sur les mains de Myrna venue visiter sa belle-sœur malade, le lundi 22 novembre 1982, puis, de nouveau, le jeudi 25 novembre, auprès de sa mère malade. Les personnes présentes ont fait une onction avec l’huile, et les deux malades ont été guéries. Le samedi 27 novembre, veille du premier dimanche de l’Avent, dans la maison de Nicolas et de Myrna, l’huile s’est mise à couler de la petite icône en papier collé dite « N-D. de Kazan », révélant ainsi sa source surnaturelle. Analysée dans plusieurs laboratoires, l’huile a été identifiée comme étant de l’huile d’olive pure à 100 %.

Plus tard, Myrna a été favorisée d’apparitions de Jésus Christ et de la Vierge Marie, et de visions de Lumière céleste ; elle a reçu plusieurs fois les stigmates de la Passion. Les messages du Christ et de sa Mère, à la fois sobres et denses, concernent principalement l’unité de l’Eglise d’Orient et d’Occident, avec une insistance particulière sur le Mystère pascal qui doit être célébré partout à la même date.

Depuis le commencement, une foule de gens, chrétiens et musulmans, viennent prier et recevoir l’onction d’huile à Soufanieh. La famille Nazzour n’accepte pas d’argent. Tout le monde est accueilli dans la maison familiale avec une simplicité et une générosité totales. Les Autorités religieuses, tant catholiques que orthodoxes, regardent les faits avec une attention bienveillante ; quant au Mufti de Syrie, il a dit simplement : « De Notre-Dame Marie, rien ne peut nous étonner ! C’est la Femme pure par excellence parmi toutes les femmes, celle qui a été choisie par Dieu pour recevoir son Verbe – selon les mots du Coran – rien ne nous étonne de sa part ! Et n’importe qui a le droit d’aller prier, demander son intercession… ». A partir d’octobre 1983, l’huile a commencé à suinter de centaines d’images de l’icône de Soufanieh, aussi bien à Damas qu’un peu partout ailleurs, suscitant de nombreux groupes de prière. Depuis, Myrna a effectué plusieurs voyages d’évangélisation au Proche-Orient, en Europe et en Amérique ; son témoignage est souvent renforcé par le signe de l’huile qui apparaît dans ses mains, et que toutes les personnes présentes peuvent voir, toucher, respirer, et s’appliquer sur le visage.

II

SOUFANIEH

DANS LA PERSPECTIVE DU PROJET NOUVEAU REGARD

« Vos péchés vous sont pardonnés parce que vous me regardez ; et en celui qui me regarde, j'écrirai mon icône ».

La visite de Myrna était attendue dans le cadre des recherches du Projet Nouveau Regard dans un domaine particulier : en dehors de toute curiosité vaine et intempestive, il s’agit de recueillir et d’étudier, à la lumière conjointe de la raison et de la foi, les signes de la présence du Royaume, autrement dit de la Nouvelle Création inaugurée par la Résurrection du Christ, et qui se manifestent en abondance dans notre monde matérialiste. Les sciences dures – Physique, Chimie etc – peuvent établir qu’il n’y a pas supercherie et constater qu’il y a bien apparition d’une substance matérielle dans des conditions inexpliquées ; elles peuvent aussi analyser ladite substance et en donner la composition chimique – dans le cas de Soufanieh, établir qu’il s’agit d’huile d’olive pure à 100 %. Elle ne peut dire davantage. Les sciences humaines apportent un certain éclairage sur le contexte psychologique et sociologique du phénomène.

Les sciences sacrées (théologie, Ecriture Sainte, Herméneutique, Ecclésiologie) prennent le relais pour établir si, oui ou non, le phénomène étudié est en cohérence avec les données de la Révélation biblique, avec les dogmes de la foi et la vie de l’Eglise à travers sa spiritualité et les expériences des saints. Une étude approfondie des paroles (« message ») qui l’accompagnent, et aussi des circonstances historiques, géographiques, sociales, culturelles etc. … de son apparition, doit permettre de dégager le sens du phénomène et son rapport aux besoins spirituels de notre temps – autrement dit sa portée prophétique.

Elle invite aussi à scruter plus avant un triple mystère : celui du prodige objectif – ici l’apparition de l’huile – qui ne saurait être considéré comme violant les lois de la nature dans la mesure où le phénomène peut être interprété comme une manifestation de la Nouvelle Création, donc obéissant à d’autres lois que celles que nous connaissons. Pour autant, on évitera de recourir, pour chaque manifestation du phénomène, à l’explication facile d’une création divine ex nihilo, en privilégiant le recours aux causes secondes (causes instrumentales), et donc – dans le cas présent – en attribuant avec plus de probabilité l’apparition de l’huile au ministère des anges (cf. Thomas d’Aquin, Sth.) – Le second aspect du mystère est celui du regard de l’homme sur les choses invisibles : regard du voyant lui-même, mais aussi – troisième aspect – regard des personnes qui reçoivent son témoignage, voient les signes (l’huile…) et y discernent des approches du Royaume ; comment leur regard sur le monde et sur leurs semblables s’en trouve modifié en profondeur, avec toutes les conséquences qui en découlent… Ces questions ont déjà été abordées au cours du Séminaire « Nouveau Regard sur les apparitions », les 16 et 17 novembre 1999, animé par Mgr. André M. LEONARD, Evêque de Namur, et par M. le Chanoine René LAURENTIN (cf. Cahiers du Nouveau Regard n° 3).

C’est dans cet esprit de profond respect et de totale ouverture que nous avons accueilli Myrna et le Père Elias. Nous pouvons dire que nous avons été comblés.

III. MYRNA A WISQUES. COMPTE-RENDU

Myrna et le P. Elias sont arrivés en voiture à l’Abbaye Saint-Paul, conduits par Patrick Sbalchiéro, le soir du mardi 24 juin, fête de la Nativité de saint Jean-Baptiste. Dans la soirée et dès le matin du 25, des entretiens privés ont eu lieu, notamment avec Pierre Perrier sur la vocation des chrétiens orientaux dans la recherche de l’unité. Le mercredi 25 juin, qui était le 15e anniversaire de la Bénédiction abbatiale du Père Abbé Dom Gérard Lafond (1988), après la Messe votive de N-D. de la Paix, concélébrée et présidée par le Père Abbé, la communauté de Saint-Paul et ses invités se sont réunis dans la grande salle de l'hôtellerie pour entendre Myrna et prier avec elle.

Le chant de l’Ave maris Stella par les moines étant achevé, avec grande simplicité et transparence, Myrna a apporté son témoignage, traduit au fur et à mesure de l’arabe en un français parfait par le Père Elias : récit de sa propre histoire et des événements singuliers qui ont commencé en 1982, avec une insistance particulière sur ce qu’elle considère comme l’essentiel du message : l’unité des Eglises d’Orient et d’Occident et, comme premier objectif, la célébration du triduum pascal à une même date par tous les chrétiens. Myrna lie très justement la réalisation de l’Unité des chrétiens à l’unité et la stabilité des familles. Elle considère que ce point précis explique le choix divin d’une famille mixte – la sienne – pour porter le message.

A l’issue de ce premier exposé, des questions ont été posées à Myrna sur sa vie familiale, les ressources qui lui permettent de vivre en refusant absolument les dons des pèlerins, l’afflux des pèlerins qui envahissent la petite maison familiale, la dévotion des musulmans envers Marie, les apparitions du Christ et de Notre-Dame, la présence discrète des Anges et l’action du démon aujourd’hui.

A une question de Pierre Perrier sur la maison, son passé, ses traditions éventuelles, il a été répondu qu’il s’agit d’une maison arabe tout ordinaire, très modeste, qui ne paie pas de mine… Pourtant, Soufanieh, le petit quartier de Damas, très modeste lui aussi (150 m2, pas plus) se trouve à 200m à vol d’oiseau de la chapelle où, traditionnellement, on rapporte que saint Ananie a rendu la vue à saint Paul et l’a baptisé (Act. 9, 17-19)… Ce rapprochement nous a paru significatif, surtout quand nous avons appris que Myrna avait perdu la vue pendant trois jours, avant de la recouvrer… Qui voit la Lumière divine en est aveuglé, jusqu’à ce que le regard soit accommodé aux réalités spirituelles…

A propos du regard, on notera plusieurs beaux passages des messages : « Toutes les fois que tu regardes les créatures, le regard du Créateur s’éloigne de toi » (26 novembre 1985) – « Vos péchés vous sont pardonnés, parce que vous me regardez. Et en celui qui me regarde, j’écrirai mon icône » (26 novembre 1986) Cf. Livret, p. 22 et 23). « Ne t’inquiète pas de ce qui se dit de toi, mais sois toujours en paix, parce que la créature me regarde à travers toi » (18 août 1989) – « Dirige ton regard vers moi, tu trouveras la paix et le repos » (14 avril 2001).

Une personne a demandé à Myrna ce qu’elle pense de l’action de Satan dans le monde d’aujourd’hui ? Elle répond : « Il est vrai que le démon existe ; mais pourquoi voulez-vous que je parle de lui ? Je ne veux pas en tenir compte, je ne tiens compte que de Dieu ». Nous avons admiré la sagesse de cette réponse.

Question du Père Abbé : « Est-ce que le Seigneur a laissé entendre que sa Venue était proche ? » – P. Zahlaoui : « Il y a un message qui nous intrigue : c’était le 28 novembre 85 (cf. Livret p. 22). « Moi, j’ai été sacrifié par amour pour vous. Et je veux que vous portiez et supportiez votre croix pour moi, volontairement, avec amour et patience, et que vous attendiez ma venue. Car celui qui participe avec moi à la souffrance, je le ferai participer à la gloire. Et il n’est de salut que par la Croix… Et si mon absence se prolonge, et que la lumière s’éclipse pour toi, ne crains pas, ce sera pour ma glorification. Va à la terre où la corruption s’est généralisée, et sois dans la paix de Dieu ». Comment interpréter : « et que vous attendiez ma venue » ? Je ne sais pas ». – Le Père Abbé : « Mais il me semble que c’est toute l’espérance chrétienne, l’attente de la Parousie, la Venue du Christ dans la gloire ! » – « C’est l’espérance chrétienne, mais y a-t-il quelque événement que le Seigneur veut nous signaler par ces paroles ? Je ne sais pas, mais… on se laisse mener par lui ! ». Commentaire ultérieur du Père Abbé : Une parole prophétique peut se réaliser à divers niveaux ; il est possible que celle-ci vise à la fois la Parousie et un nouveau régime d’apparitions pour Myrna, par exemple. En tout cas, la promesse qui suit est claire : Celui qui participe à ma souffrance, je le ferai participer à la gloire… Si mon absence se prolonge – pour Myrna privée d’apparitions, mais aussi pour toute l’Eglise comme abandonnée à la foi pure – ne crains pas, ce sera pour ma glorification – à la Fin, pour toi comme pour toute l’Eglise, ma gloire éclatera.

Quelle différence entre apparitions et extases ? – « Au cours de l’apparition, c’est la Vierge qui visite Myrna, et au cours de l’extase, c’est elle qui visite la Vierge. (réponse de Myrna, traduite par le P. Elias). Cette distinction, assez énigmatique, fait probablement allusion à sa propre expérience : elle a vu la Vierge venir vers elle, du sommet de l’arbre à son balcon ; tandis que l’extase semble la propulser vers le Christ ou vers Notre-Dame…

« C’est soit la Sainte Vierge qui lui parle, soit Jésus. Au cours des extases, quand elle voit la lumière, avec une Personne très lumineuse, une voix virile, elle dit que la voix vient du cosmos. Et quand elle ouvre les yeux et qu’on lui dit : Tu as vu quelque chose ? Elle dit : oui, j’ai vu ceci… Dis-nous ce que tu as entendu : chaque fois ou presque, que c’est le Seigneur qu’elle a vu en extase, elle nous a dit immanquablement, avant de dicter le message : Je n’ai rien compris ! Alors on insistait : Dis quand même ! Parce que, tant qu’elle a la lumière intérieure, elle entend la voix. Mais dès lors qu’elle nous dicte, elle se lève du lit, la lumière disparaît, et elle ne se rappelle plus des paroles, mais seulement de la vision. Pour la Sainte Vierge, d’habitude la Sainte Vierge parle en arabe dialectal, très simple – par ex. le 14 août 1985 » (Livret p. 21).

« La Vierge a pleuré quand on a transporté l’image à l’église… Par la suite, on a compris que c’était une manœuvre pour étouffer le phénomène. En pleurant, la Vierge a dit : Malech ! (transcription incertaine d’après l’enregistrement) : çà ne fait rien… »

Réflexion du Père Elias : « Pour la première fois dans l’histoire, Jésus et Marie parlent arabe…C’est très important par les temps qui courent, et c’est très symbolique… Damas, St Paul, et 2000 ans après, Soufanieh, d’une telle ampleur : des gens qui viennent du monde entier, maintenant. La Syrie, si méprisée comme tout ce qui est arabe ; Damas si méconnu… Et le Seigneur a choisi Damas ! ».

Myrna a-t-elle un charisme de guérison ? Réponse de Myrna : « Nous sommes tous malades, et un malade ne guérit pas un malade. On a tous besoin de Dieu. D’après moi, la guérison vient en premier lieu de la volonté de Dieu ; et ensuite, de la foi de la personne qui sollicite cette grâce. Il y a des gens qui se sont laissés oindre de la tête aux pieds par l’huile, rien n’a changé en eux, ni physiquement, ni psychologiquement, ni spirituellement. Par contre, d’autres personnes qui étaient venues et qui n’avait pas vu l’huile, ont été guéries ».

Question du Père Abbé : « Comment Myrna comprend-elle le signe de l’huile ? Myrna répond : « Au début, je n’ai pas compris ce que signifiait ce signe de l’huile. Beaucoup demandaient : pourquoi de l’huile et pas de l’eau, par exemple ? Après une vingtaine d’années, j’ai fini par comprendre que l’huile est symbole de plusieurs choses. Dans l’Ancien testament, on parle beaucoup de l’huile. Pour nous, dans le Nouveau Testament, c’est le symbole du baptême, symbole de lumière, symbole de paix, symbole de vie. Moi, je dis qu’à Soufanieh, l’huile, c’est pour la guérison de l’Eglise ; car l’Eglise aujourd’hui est malade, blessée ; pour que cette blessure guérisse, il faut une onction d’huile de la part du Seigneur, pour que ses enfants se retrouvent les uns les autres dans l’unité, et c’est ainsi que se construit la richesse de l’Eglise dans l’union de ses enfants. Si le Seigneur intervient, c’est pour nous provoquer à nous réunir autour de lui, pour sauver, entre autre, la jeunesse qui s’effiloche complètement. » [Fin de la 1e cassette, départ de Pierre Perrier].

2e cassette. Anne Dambricourt : « Vous vous demandez la raison pour laquelle vous êtes ici aujourd’hui. Il faut savoir que dans cet endroit, dans cette pièce, le Projet Nouveau Regard est né, à l’initiative de Dom Lafond. Et cette initiative est très importante pour nous, scientifiques. Si l’Occident, si la France, est malade, c’est à cause du matérialisme, du scientisme. On dit que la science va tout expliquer… Ce genre de manifestation (Soufanieh), comme aussi le Saint-Suaire, s’adresse à une génération qui est détruite par cette idéologie scientiste ».

P. Elias : « A propos du scientisme : dans le monde arabe, depuis au moins une quarantaine d’années, c’est une vague de scientisme qui ravage tout, y compris la jeunesse aussi. Et quand le Phénomène (de Soufanieh) s’est déclenché, on entendait dire, même de la part des prêtres : un jour la Science expliquera comment ce petit bout de papier donne des kilos d’huile ! Imaginez ! Des prêtres qui prétendent cela ! Voyez ! Et à plus forte raison les gens. Si bien que – réfléchissant à la question – j’ai jugé nécessaire d’apporter une réponse, et j’ai pensé au livre d’Alexis Carrel : Le voyage de Lourdes. Alexis Carrel, ce n’est pas le premier venu. J’ai demandé à un ami, un homme qui a une très belle plume arabe et un cœur apostolique, de traduire le Voyage de Lourdes d’Alexis Carrel. Il a fait un choix aussi parmi les ouvrages d’Alexis Carrel : Réflexions sur la conduite de la vie, la Prière, etc. et on a imprimé le livre à Damas. En Syrie, tout ce qui est imprimé doit avoir l’autorisation du Ministère de l’Information. On a obtenu l’autorisation. Il a imprimé ce livre, et on l’a distribué gratuitement à des milliers d’exemplaires. C’était une réponse indirecte à quiconque prétend que la science a tout expliqué. Avec le temps, bien des réticences, bien des objections croulent, réellement… »

« On va terminer cette rencontre par un chant de Myrna ». Myrna récite en arabe la belle prière que Jésus lui a apprise (Livret p. 19, en français). Et elle chante en arabe l’Ave Maria de Lourdes, le refrain en latin étant repris par tous.

Après la prière, Myrna s’est retournée pour baiser le pied du Christ à l’ange qui était au mur, derrière elle, et l’huile est apparue sur la face interne de ses mains… Chacun a pu constater le fait, recevoir l’huile dans ses propres mains et s’en oindre le visage… Après quoi, tout le monde s’est rendu à l’église pour chanter l’office de Sexte.

Après le déjeuner, le groupe s’est rendu à l’Abbaye Notre-Dame, au grand parloir pour y rencontrer la Communauté des Moniales. Myrna a redonné son témoignage, un peu plus brièvement qu’à Saint-Paul. Le don de l’huile s’est reproduit, Myrna étant tournée vers l’assistance, et bien visible par tous ; une partie de l’huile s’est répandue sur la table, que le Père Zahlaoui a recueilli aussitôt sur un mouchoir en papier qu’il a offert à la Mère Abbesse. Après quoi le groupe s’est rendu à l’église Notre-Dame pour participer aux Vêpres des moniales. Puis il a regagné l’Abbaye Saint-Paul.

Le Jeudi 26, après la Messe conventuelle, la réunion a commencé par la prière du rosaire (Mystères lumineux), suivi de la bénédiction d’une icône de Notre-Dame de Cambrai. Myrna a baisé cette icône, ainsi que celle de l’oratoire du Père Abbé. Puis l’entretien s’est poursuivi.

3e cassette. Question du Père Abbé : « Lorsque l’huile apparaît dans vos mains, est-ce que vous ressentez quelque chose, soit dans votre corps et votre sensibilité, soit dans votre âme (par exemple un plus grand recueillement) ? Réponse traduite par le P. Elias : « Elle ne sait pas d’avance s’il va y avoir émission. Elle constate qu’il y a de l’huile sur ses mains, elle n’arrive pas à exprimer son sentiment. Elle sait que quelque chose est présent ; qu’il y a quelque chose en elle qu’elle n’arrive pas à exprimer, quelque chose au fond d’elle-même ; un frisson, mais intérieur. Elle entre dans un grand recueillement et une grande paix, cela se voit sur son visage. Ce sentiment accompagne, à l’instant même, l’exsudation d’huile. Sans être précédé de quoi que ce soit ».

Deuxième question, plus simple : y a-t-il encore des apparitions ? – La dernière a eu lieu le 24 mars 1983. – La Vierge apparaît au cours des extases, la dernière était le 28 novembre 2001. On s’attend à quelque chose à la fête de Pâques 2004, date commune aux Orthodoxes et aux Catholiques.

Le Père Abbé : « Avez-vous une expérience de la présence angélique ? » – Réponse de Myrna : Non ! – Le Père Abbé : Mais c’est pourtant probablement aux anges qu’il faut attribuer, selon la doctrine de saint Thomas d’Aquin, la mise en œuvre des apparitions, et aussi la production d’huile, les stigmates etc…

Elle réfléchit et dit : Peut-être ce sont les anges qui l’ont poussé dans le dos, pour la mener à la rencontre de la Vierge ?... En elle-même, elle dit maintenant : oui, c’est l’Ange ! – Est-ce que vous priez votre Ange gardien ? – Non ! (rire). Il y a des gens qui connaissent leur Ange gardien. Mais elle ne peut pas adresser une prière à quelqu’un qu’elle ne connaît pas ! (rire). Elle est sûre que Jésus et Marie lui ont parlé. Mais les anges, non ! Alors… – Le Père Abbé : mais ils sont là quand même !

Question sur les stigmates. Ils sont différents de ceux du Padre Pio : ils ne sont pas permanents. « Est-ce qu’elle revit la Passion ? – Le Seigneur ne veut pas lui imposer la souffrance que, lui, a souffert, et il lui donne selon sa capacité de souffrance. – Voit-elle le Seigneur portant sa Croix, par exemple ? – Elle a vu le Christ porter sa Croix, dans le silence le plus total. Au pied de la Croix, il y avait trois femmes habillées de noir, avec une personne recroquevillée au pied de la Croix. Elle a entendu une voix, au milieu d’un silence terrible : Père, pardonne-leur, parce qu’ils ne savent pas ce qu’ils font.

Patrick Sbalchiéro : « Est-ce que Myrna se voyait au milieu des personnages, ou en tant que spectatrice ? – Réponse : elle était au milieu des gens. Le samedi saint 1990, le Christ a béni les gens (il était ressuscité) et Myrna se trouvait parmi les gens que le Christ bénissait. Au-dessous de lui, mais en extase, et je me rappelle qu’elle avait levé la main, avec une lenteur bouleversante, avec la main comme à la messe, et elle a fait comme ça. Quand elle a ouvert les yeux, on lui a demandé ce qu’elle avait vu, elle a dit : J’ai vu le Christ ressuscité habillé de blanc. Quand elle a fait ce signe-là, elle a dit trois fois : le Christ est ressuscité, et tous, on a répondu : il est vraiment ressuscité ! Elle était toujours en extase. Fin de l’entretien.

Texte du Livre d’or.

Myrna a écrit ce qui suit sur le Livre d’or de l’abbaye, de sa belle calligraphie arabe. Traduction par le P. Elias, légèrement modifiée.

« Je te remercie, mon Dieu, pour ce que tu m’as accordé aujourd’hui, surtout ma rencontre avec tes bien-aimés dans le monastère Saint-Paul. J’ai été très heureuse de les rencontrer et de prier avec eux. Je me suis sentie comme si j’étais au ciel.

« Mes frères bien-aimés en ce monastère, je vous porterai dans mon cœur. J’élèverai ma prière devant l’icône de N-D. de Soufanieh à Damas (Syrie) pour qu’elle intercède auprès de Son Fils Jésus, afin qu’il vous donne la force et l’énergie constante pour réaliser la glorification de Dieu et accomplir Sa volonté. Souvenez-vous de moi dans vos prières, et souvenez-vous de ma famille : Myrna, Nicolas, Myriam et Jean Emmanuel. Le 26 juin 2003. »

Il nous faut maintenant scruter les Saintes Ecritures pour y découvrir le message biblique de l’huile.

II. Le signe de l’huile dans la Bible et à Soufanieh.

La Terre Sainte – Terre ruisselante de lait et de miel – est Terre de bénédiction tant que le peuple de Dieu est fidèle : « Je donnerai à votre pays la pluie en son temps… et tu pourras récolter ton froment, ton vin nouveau et ton huile » (Dt 11, 14. Cf. Dt 7, 13). Le psalmiste en rend grâces à Dieu : « De tes chambres hautes tu abreuves les montagnes ; la terre se rassasie du fruit de tes œuvres ; tu fais croître l’herbe pour le bétail, et les plantes à l’usage des hommes, pour qu’ils tirent le pain de la terre et le vin qui réjouit le cœur de l’homme, pour que l’huile fasse luire les visages, et que le pain fortifie le cœur de l’homme » (Ps 103, 13-15). Ces éléments fondamentaux, nécessaires à la vie de l’homme et source de joie, deviendront, sous le régime de la Nouvelle Alliance, sacrements de la Vie éternelle : le Pain et le Vin eucharistiques, et l’onction de l’Esprit-Saint.

Mais quand la famine sévit dans le pays par suite de l’infidélité du peuple, alors Dieu pourvoit lui-même au besoin de ses fidèles : « Ainsi parle YHWH, le Dieu d’Israël : Jarre de farine ne s’épuisera, cruche d’huile ne se videra, jusqu’au jour où YHWH enverra la pluie sur la face de la terre. Elle (la veuve de Sarepta, hôtesse du prophète Elie) alla, et fit comme avait dit Elie, et ils mangèrent, elle, lui et sa maison, pendant longtemps. La jarre de farine ne s’épuisa pas et la cruche d’huile ne se vida pas, selon la parole que YHWH avait dite par le ministère d’Elie » (I R 17, 14-16).

A Soufanieh, quand l’infidélité se répand dans le monde, Dieu donne l’huile en abondance, pour répondre à tous les besoins de ses fidèles et les remplir de joie.

L’huile est signe de consécration au service du Seigneur, tant pour les choses que pour les personnes. Cela tient à ses qualités naturelles de douceur et de pénétration. Tout objet qui a reçu une onction d’huile se laisse pénétrer par elle, et ne pourra jamais plus retrouver son état premier. En outre, la douceur de l’huile protège l’objet du dessèchement, de la sclérose et de la corruption, et, quand il s’agit d’un être vivant, elle le nourrit et le fortifie.

A Béthel, Jacob verse de l’huile sur la tête de la stèle qu’il a érigée au lieu même où il a vu en songe un escalier joignant le ciel et la terre, parcouru par les anges de Dieu. Il en fait ainsi « une Maison de Dieu et la Porte du Ciel » (Gn 28, 17), c’est-à-dire un sanctuaire consacré où l’on pourra rencontrer Dieu et recevoir ses bénédictions.

A Soufanieh, l’huile venue du ciel invite les fidèles à se consacrer au Seigneur par les mains de Marie, et à se souvenir qu’ils sont les temples du Saint-Esprit.

L’huile est par excellence la matière de l’onction royale. Dans l’Apologue de Yotam, on fait dire à l’olivier : « Devrai-je renoncer à mon huile, par laquelle on honore Dieu et les hommes ? » L’huile est en effet un élément essentiel des mets offerts à Dieu dans le Temple (Lév. 2), mais, surtout, elle consacre les rois. « Samuel prit la fiole d’huile, la versa sur la tête de Saül, puis il l’embrassa et dit : N’est-ce pas YHWH qui t’a oint comme chef de son héritage ? C’est toi qui jugeras le peuple de YHWH et le délivrera de la main de ses ennemis d’alentour. Et voici pour toi le signe que YHWH t’a oint comme Chef sur son héritage. Quand tu m’auras quitté aujourd’hui (…) tu rencontreras une troupe de prophètes descendant du Haut-Lieu… Alors l’Esprit de YHWH fondra sur toi, tu entreras en transe avec eux, et tu seras changé en un autre homme. » (I S 10, 1.5b-6).

Saül rejeté, David reçoit l’onction royale des mains de Samuel : « YHWH dit à Samuel : (…) Emplis ta corne d’huile, et va ! Je t’envoie chez Jessé, le Bethléemite, car j’ai vu parmi ses fils le roi que je veux (…) Jessé l’envoya chercher : il était roux, avec un beau regard et une belle tournure. Et YHWH dit : Va, donne-lui l’onction, c’est lui ! Samuel prit la corne d’huile et l’oignit au milieu de ses frères. L’Esprit de YHWH fondit sur David à partir de ce jour-là et dans la suite » (I S 16, 1.12-13a). A noter dans ces deux textes la relation explicite de l’onction avec l’Esprit-Saint. David est ensuite oint à Hébron comme roi sur la tribu de Juda par ses représentants qualifiés (II S 2, 4), puis sur les tribus du Nord, comme roi sur Israël (II S 5, 1-4). Désormais, les fils de David, à commencer par Salomon – oint par le prêtre Sadoq (I R 1, 39) – recevront l’onction et seront les messies du Seigneur : « Ton trône est divin, un trône éternel ; ton sceptre royal est sceptre de droiture : tu aimes la justice, tu réprouves de mal. Oui, Dieu, ton Dieu t’a consacré d’une huile de joie, comme aucun de tes semblables ; la myrrhe et l’aloès parfument ton vêtement… » (Ps 44, 7-9a). La joie est la caractéristiques des temps messianiques : d’où la mention de l’huile de joie. L’onction royale messianique annonce les temps nouveaux et répand la joie de l’Esprit-Saint sur tout le peuple.

Plus tard, quand il n’y aura plus de rois en Israël, le Grand-Prêtre recevra l’onction : « Tu feras approcher Aaron…tu prendras l’huile d’onction, tu en répandras sur sa tête et tu l’oindras » (Ex 29, 4a.7). L’onction royale et sacerdotale est pour le peuple de Dieu source d’unité et de charité fraternelle : « Oui, il est bon, il est doux pour des frères de vivre ensemble et d’être unis ! On dirait un baume précieux, un parfum sur la tête, qui descend sur la barbe, la barbe d’Aaron, qui descend sur le bord de son vêtement. On dirait la rosée de l’Hermon qui descend sur les collines de Sion. C’est là que le Seigneur envoie la bénédiction, la vie pour toujours » (Ps 132). Un proverbe compare l’huile et le parfum à la douceur de l’amitié, et l’oppose à la complaisance en soi-même : « L’huile et le parfum mettent le cœur en joie, et la douceur de l’amitié, plus que la complaisance en soi-même » (Prov. 27, 9).

Jésus, conçu de l’Esprit-Saint, né de la Vierge Marie, est le Messie par excellence, et il est salué comme Christ par la profession de foi de Pierre : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant » (Mt 16, 16). Il est l’Epoux du Cantique des cantiques, et son Nom, c’est-à-dire toute sa personne, « est une huile qui s’épanche » (Ct 1, 3), se répandant avec douceur sur tous ceux qui l’invoquent, pour communiquer le don de l’Esprit-Saint.

A Soufanieh, l’huile donnée par la Mère du Roi Messie atteste de la Présence de Jésus, Prêtre et Roi ; elle montre que l’onction qui vient d’en-haut est dispensatrice de douceur et de charité fraternelle, source de l’unité des chrétiens et de la paix pour tous les hommes ; elle apporte paix et joie ; elle annonce la venue de Jésus dans la gloire. Il est en effet remarquable que les visions du Christ sont précédés d’une douloureuse émission d’huile par les yeux. L’huile étant la marque du Christ (l’Oint par excellence) et le signe de sa Présence, il paraît logique que le regard de Myrna soit purifié et préparé à recevoir la vision. Tout cela est en parfaite harmonie avec les paroles du message.

L’huile est encore bienfaisante de multiples manières. Elle guérit les plaies, rend la santé, donne la force au guerrier pour le combat. A Soufanieh, les croyants sont guéris de leurs péchés et préparés au combat spirituel. Myrna est donc fondée à croire que l’huile est donnée pour la guérison de l’Eglise, malade de la division des chrétiens et blessée par les assauts du démon.

Enfin, l’huile nourrit la flamme des lampes, l’huile se transforme en lumière, l’huile illumine tous ceux qui s’approchent de la lampe. Elle est donc liée au symbolisme très riche de la lumière. Les dix vierges de la parabole (Mt 25, 1-13) attendent la venue de l’Epoux, ayant chacune une lampe allumée qui brille dans la nuit, accompagne leur veillée et représente leur vigilance dans la foi et la charité. Les cinq prévoyantes ont une réserve d’huile, car la Parousie pourrait arriver plus tard que prévu… Mais les cinq étourdie n’ont pas pris cette précaution : elles ne seront pas au rendez-vous. A Soufanieh, le Christ fournit l’huile pour nos lampes : il nous invite à veiller dans la foi et à espérer sa venue dans le gloire.

Saint Jean Baptiste est comparé par le Seigneur à la lampe qui brille et qui luit ; mais lui-même est la Lumière du monde. L’huile de Soufanieh nous invite à préparer les voies du Seigneur qui illumine tout homme en venant dans le monde (Jn 1, 9) et qui sera pour l’éternité la lumière de la Jérusalem céleste (cf. Ap 22, 5).

 

+ Gérard Lafond OSB, Abbé de Wisques

21 septembre 2003